l’art du presque rien

Dans la lignée des artistes qui ont tenté de démythifier l’objet d’art à la fin des années 60, certains artistes contemporains renouvellent un intérêt pour un art « fragile », un « art du presque rien » imbriquant l’art et la vie. Mais loin de prôner le banal dans l’art, ces artistes transfigurent le réel en captant des instants fragiles, comme autant de moments de poésie qui a y regarder de plus près font toute la saveur de la vie. Par leur retenue formelle, ils font preuve d’une acuité de perception traduisant leur sensibilité au monde. Chez Joachim Mogarra, cette sensibilité s’exprime par d’infimes fragments de réalité transcendés et métamorphosés par l’artiste. La vision poétique de Francis Alÿs garde la trace d’une présence, d’un geste anodin qu’il transforme en événement ou plutôt en non-événement. Car l’art fragile se veut éphémère. C’est ce phénomène d’apparition/disparition qui rend cet art si fragile. Les œuvres de Cai Guo-Qiang prennent la forme de sculptures mouvantes malmenées par le vent, de dessins qui surgissent des explosions de poudre. De la cendre naît la toile, à l’image des œuvres de Wolfgang Laib réalisées à partir de pigments ou de pollens disséminés rituellement au sol.